18 janvier. Silarluppoq, mauvais temps. Plus précisément : perluppoq, tempête de neige. Le vent neigeux estompe la ville, molletonne les chaussées, noie les yeux et pince les pommettes. J’ai la sortie des narines qui colle.
Je me dégivre au G.U.X. En danois, G.U.X.= Gymnasium+Éducation+Examens. C’est le lycée. Ze lycée pour tout le Nord du Groenland. Je remplace pendant une semaine Jette Larsen, la prof de français (sur les quatre lycées que compte le Groenland, seuls ceux de Nuuk et d’Aasiaat proposent l’enseignement de cette langue). Je loge à l’internat.

Il y a 3 niveaux, et Jette m’a ménagé une séance de 3 heures avec chaque groupe. Nous batifolons entre petits dialogues de français élémentaire, rappel des insensés périples arctiques du Manguier, jeu mémo-technique des quasi-homonymes groenlandais-français (1), satisfactions éparses de curiosités réciproques variées (2), enfin – surtout – évocation biculturelle de la nuit polaire dont nous sortons à peine. Version à partir d’extraits de mes textes sur le sujet, micro-atelier d’écriture en groenlandais, thème, lecture à voix haute en chœur et en solo … autant de tests pour la réalisation du projet de lecture publique bilingue.

En bonus, un conseil (fruit de ces échanges en milieu lycéen): si vous voyez une aurore boréale, il ne FAUT PAS siffloter ni siffler ! Si vous le faisiez, on viendrait vous couper la tête. Les aurores boréales, ce sont les ancêtres qui jouent au foot dans le ciel avec les têtes coupées. « Quand nous étions petits, nous étions terrorisés à cette vue, nous nous précipitions à la maison ! »
Et les dernières nouvelles de Kassarfik. Ceux du Manguier me SMSent : « Blizzard à décorner les umimaks ici. Mais ça bosse dur. »
Je me demande si la coque sera enfouie dans une congère.
- Ça va = mouton
À dada = papa
Ananas = maman
Ah c’est ça = petite chérie
Panique = fille
Arnaque = femme - Avouons que, à l’oral, l’anglais est d’un grand secours pour la compréhension mutuelle.
« Cul (ass) > culotte », « veste » et « tricot », « pipeau », « la guitare », « il est encore trop tôt », « être en retard », « chanter »… : extraits du cours de français inscrit au tableau (cf photo 1, ci-dessus)… Chépas quel auteur ils étudiaient avant ton intervention mais on dirait que tes élèves sont fin prêts pour Brassens… Elle va rigoler Jette !
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