Fouler la toundra Paulatuk, 12 juin 2014 par CZH

Nécessité oblige! ça s'appelle "Extension de permis de séjour". Agathe et moi devons renouveler notre demande de permis de séjour au Canada avant la date fatidique du 20 juin. Impossible de faire cette demande à partir de la connexion satellite du bateau malgré les échanges plus que cordiaux que nous entretenons avec l'officier de l'immigration d'Inuvik! Il nous faut donc envisager une virée au village. Par ailleurs, la banquise devient chaque jour un peu plus hors d'usage. L'eau de fonte a fini par s'écouler de la surface, supprimant les mares à la profondeur traitreuse, mais les fissures s'agrandissent et l'accès à la côte est de plus en plus réduit. Impossible d'imaginer partir en motoneige. Il n'y a plus qu'une solution, celle qui orne nos extrémités en contact avec le sol!

Sur la glace

Phil et cécile

Glace

Nous recalculons soigneusement la distance entre le bateau et Paulatuk: 26 km. Sans tortiller. Premier challenge: motiver Agathe! On ne peut pas la laisser seule, elle fera partie de l'expédition. Elle se montre brave et moyennant un cake banane chocolat et une tarte aux oignons, elle se prête de bonne grâce aux préparatifs. Ensuite: faire nos sacs. Que faut-il emporter? Après bien des tergiversassions nous finissons par nous décider: une combinaison de survie (pour les passages à gué) et la carabine, (histoire, si besoin, d'éloigner les grizzlis). Au village, nous serons logés chez Maya, la nouvelle recrue du parc national de Tuktu Nogait. Arrivée en février elle vient occuper un poste vacant depuis trois ans. Une perle qui semble avoir été conçue sur mesure pour le village! Originaire de l'Ontario, elle a passé ces quinze dernières années à sillonner les parcs nationaux du Canada. Guide d'expéditions en canoë, elle manie aussi bien la pagaie que l'aiguille à broder puisqu'elle s'illustre aussi dans la confection de magnifiques mocassins.

Mocassins Maya

Depuis quelques jours, l'été s'est déclaré, le soleil est au beau fixe. Nous arrêtons le départ: mardi matin, 10h00 avec la marée basse. Cap au 149. Nous couperons sur la banquise jusqu'à l'entrée d'Argo bay puis nous longerons la côte jusqu'au village.

La première traite (6km) sur la banquise se fait sans problème, le soleil tape, nous enlevons à chaque pas une couche d'habits. La marée est basse lorsque nous atteignons la côte. C'est facile de gagner la terre ferme.

Glace et ciel

Fata morgana

Nous traversons la toundra qui verdit et fleurit à vue d'œil.

Arrivés sur la lagune de Sugvak, nous croisons les doigts pour que l'autre rive soit accessible (d'où la combi!). Il y a bien un passage à terre mais cela fait faire un gros détour.

Arrivés au bout du cordon…suspense…la marée est montée, et de toute façon, même à marée basse, c'est trop profond ! Marche arrière. Nous étions quasiment à mi parcours. Arrêt pique-nique pour reprendre des forces. Et nous attrapons un wagonnet de glaçons qui nous permet de gagner la banquise en sautant à cloche pied et de poursuivre notre route en longeant la côte sur le pack ice.

Sur la glace encore

On commence à accuser le coup. Agathe fait preuve de vaillance mais lorgne le petit bout de colline sur lequel nous faisons cap avec anxiété (promesse de la prochaine halte) et nous rappelle à l'ordre si nous en dévions d'un quart de degré.

Un petit vent du sud nous apporte des bouffées de chaleur incroyable, un peu comme si la porte du four était ouverte. A chaque embouchure de rivière la banquise présente un réseau fissures qui se prolongent loin vers le large. Nous sautons de blocs en blocs. Nous parvenons sur un petit talus à côté d'un cours d'eau cristallin. L'endroit est enchanteur. D'ailleurs, le nombre de traces d'ours est là pour le confirmer. Une autre pause s'impose.

Pose

 Il est environ 18H00. Un bruit de moteur attire notre attention. Un quad apparait. Un gars accompagné de deux jeunes filles va à la pêche. Tout le monde au village est au courant de notre arrivée. Il paraît que Jonah est parti à notre recherche! Nous rejoignons la piste des quads, un peu en hauteur. Peut-être nous rencontrerons nous. Le terrain est de plus en plus vallonné, le ciel est d'un bleu implacable. Une multitude de lacs miroitent à perte de vue. Cécile

Toundra

Deux autres quads nous confirment le départ de Jonah. Nous continuons à cheminer par monts et par vaux, la plante des pieds tiraille, les épaules pèsent. Allez, on se motive! Le village se rapproche lentement! Soudain, un autre quad nous rejoint, c'est Jonah!!!

"Hey guys you were just invisible, I come from your boat ! I missed you!". Agathe a retrouvé le sourire et saute d'enthousiasme. Nous nous empilons sans nous faire prier à l'arrière du quad et parcourons les 4 derniers km dans un nuage de poussière exaltant. Jonah nous dépose devant la maison de Maya. Il habite juste à côté. "On se verra demain, bonne nuit!"

 L'accueil de Maya est aussi extraordinaire. Sans chichi. Je fais honneur à la douche pendant que Philippe et Agathe se désaltèrent. Elle dispose d'une maison surdimensionnée pour elle toute seule, affirme-t-elle. Elle nous a préparé des lits dans différentes chambres avec draps et couverture.

Bonheur! On a du mal à se décider à aller se coucher. Trop de lumière, trop de choses à se raconter! Enfin, à 2h du mat, nous rejoignons nos pénates …11h de marche quand même …

 

 


2 réflexions sur “Fouler la toundra Paulatuk, 12 juin 2014 par CZH

  1. Merci pour les nouvelles et les photos ! Je commence à me demander si on ne s’est pas suréquipé Samuel et moi pour venir vous rejoindre 😉
    A tout bientôt !
    Olivier

    J’aime

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