Je suis en pleine lecture de l’Iliade, une version retravaillée et un peu raccourcie par Alessandro Barrico. Alors… l’imaginaire m’a emporté. La guerre qui y fait rage à quelque chose de semblable à ce qui ce passe ici. Je connais l’issue de la bataille mais l’histoire tient suffisamment en haleine pour chaque jour observer le combat qui se mène. C’est une guerre sans héros, sans armure, sans le sang noir qui coule mais il y a tout de même des attaques, des calmes, des progressions et des replis. Le recul de la banquise est comme une légende fascinante qui pourrait se conter.
J’hésite, entre la joie d’entendre à nouveau le clapotis de l’eau et la tristesse de voir le silence blanc disparaître.
Alors que le soleil ne dit plus vraiment l’heure, le mouvement de la mer fait se remettre en route le temps. Nous sortons du silence et du calme qui nous portait en perdant pied sur une mer liquide que l’on avait oubliée. Après ces mois sur le Manguier immobile, la rapidité de la débâcle fait chanceler. Le rythme des vagues me rattrape et annonce la fin de la torpeur hivernale où l’on pourrait se perdre et continuer de vivre, il semble, indéfiniment. Déjà, où l’on a souvent marché, il faut maintenant naviguer. La mer s’avance à grands pas et le bateau aussi sent que bientôt il se balancera.
J’observe l’entre deux, l’immobile puis l’incessante ondulation. Mais la seconde est plus forte cette fois-ci. La lisière n’est nette qu’un instant car la glace craque et s’en va, très doucement, mise en mouvement, ballottée par les flots.
Le niveau de la glace est plus haut que la surface de l’eau. Les vagues ne montent pas sur la banquise.
Dans la neige qui tombe encore, la ligne mouvante de l’eau creuse une rainure dans l’épaisseur de la glace comme si c’était une lame. Et de cette eau qui tape et qui creuse, résonne le clapotis. Le silence est rompu. La tendance s’inverse et le froid qui persiste ne peut rien contre l’appétit de la mer qui grignote à toute heure. Accompagnée du vent, elle arrache des plaques et les envoie au loin.
Seuls restent suspendus aux parois de la côte des bourrelés solides à la teinte bleutée quand la marée descend.
Mais depuis trois jours, c’est la trêve, la ligne reste figée.
Cette grande surface blanche qui semblait infinie est maintenant bordée de gouffres. On peut s’y approcher, se tenir au bord et regarder en bas, la mer à nos pieds.
Seul le canoë a descendu la marche pour nous faire faire un tour.
Pour le contenu, visiblement va falloir attendre une connexion plus fluide.
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La connexion s’est visiblement fluidifiée 😉
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Le contenu s’est fait attendre ; mais alors quel beau texte, Louis.
Puisque tu évoques Barrico, j’espère que contrairement à Danny Boodmann T.D. Lemon Novecento, tu vas bientôt pouvoir rejoindre la terre ferme.
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Et très belles photos.
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